Avec un investissement de 3,9 milliards FCFA, le Tchad renforce sa stratégie industrielle. Gounou-Gaya accueille une nouvelle usine d’égrenage, capable de traiter jusqu’à 21 000 tonnes de coton par campagne. Un levier majeur pour une filière dont dépendent plus de 3 millions de Tchadiens.
Après l’ouverture d’une usine de délintage, Gounou-Gaya franchit un cap supplémentaire dans la structuration de sa filière cotonnière avec la mise en service d’une nouvelle unité d’égrenage. Dotée d’une capacité théorique de 149 tonnes de coton graine par jour, pour une cadence pratique de 121 tonnes, cette infrastructure permet d’atteindre un objectif de 21 000 tonnes par campagne annuelle (180 jours). Ce projet représente un levier industriel de premier plan pour la région, répondant à un besoin criant de transformation locale des récoltes, souvent ralentie par des contraintes logistiques et climatiques.
L’investissement de 3,9 milliards FCFA, porté par Coton Tchad-SN et entamé en février 2023, illustre l’importance stratégique accordée à ce pôle. La décision de relancer une usine dans cette ville n’est pas fortuite. Comme l’explique Olivier Renson, directeur général de la société, « Gounou-Gaya est un centre stratégique de la production cotonnière au Tchad ». C’est à partir de ce site que les semences sont produites puis distribuées sur l’ensemble des zones cotonnières du pays. La fermeture de la précédente unité en 2009 avait laissé un vide logistique, freinant la productivité régionale et affectant la chaîne d’approvisionnement en intrants.
L’usine nouvellement installée représente donc une étape essentielle dans la stratégie de relance de la filière coton, alors que plus de 3 millions de Tchadiens dépendent directement de cette culture pour leur subsistance, selon le ministre du Commerce par intérim, Dr Boukar Michel. Celui-ci a appelé l’actionnaire majoritaire, le groupe singapourien Olam, à jouer un rôle plus actif. « Il y a des choses qui ne nécessitent pas d’argent, mais de la volonté », a-t-il lancé, insistant notamment sur la sensibilisation des cultivateurs et la mécanisation des pratiques agricoles pour augmenter les rendements.
En plus de sa capacité industrielle, cette infrastructure est attendue comme un moteur d’impact socio-économique fort. En supprimant les retards de collecte du coton graine — souvent laissés dans les centres d’achat à la merci des intempéries —, l’usine contribue à sécuriser les revenus des producteurs. Elle participe aussi à la lutte contre l’exode rural, en créant des emplois directs et indirects dans la chaîne de valeur locale. Pour le Premier ministre Allah Maye Halina, « c’est un fleuron du tissu industriel qui renaît », appelant dans la foulée la Coton Tchad-SN à aménager les pistes rurales afin de garantir une accessibilité logistique optimale.
À moyen terme, la direction de Coton Tchad-SN table sur une montée en puissance. Objectif affiché : dépasser les 50 000 tonnes de coton égrené par campagne. Une ambition qui devra s’accompagner d’investissements complémentaires, aussi bien dans les infrastructures de transport que dans les outils de collecte. L’enjeu est aussi de répondre à une demande croissante sur les marchés internationaux, alors que le coton tchadien jouit d’un positionnement qualitatif reconnu, notamment dans les chaînes d’approvisionnement textiles africaines et asiatiques.