Dans une CEMAC financière en léger repli, une société indépendante tire brillamment son épingle du jeu. Avec 422 milliards FCFA sous gestion, ESS Bourse surclasse les poids lourds bancaires pour s’installer solidement en tête du classement 2024 des sociétés de bourse.
L’année 2024 n’a pas été tendre avec le marché financier de la Communauté économique et monétaire d’Afrique Centrale (CEMAC). Si le portefeuille global des sociétés de bourse a atteint 1 734,7 milliards FCFA, soit une hausse de 11 %, la dynamique reste bien en-deçà des 65 % de croissance enregistrés en 2023. La faute à une inflation persistante et des conditions d’emprunt plus strictes qui ont refroidi les ardeurs des émetteurs. Seuls le Gabon et la BDEAC ont levé des fonds sur la place. Pourtant, dans cet environnement atone, un acteur a creusé l’écart.
ESS Bourse, société indépendante fondée en 2020 par le Camerounais Christian Din Dika, s’est hissée au sommet avec une performance impressionnante : 422 milliards FCFA d’actifs sous gestion, représentant 24,35 % du marché. Avec une progression de près de 50 % sur un an, elle devance des structures adossées à des groupes bancaires de renom. Un exploit salué dans la sphère financière : « Nous avons misé sur la proximité avec les émetteurs et une ingénierie financière sur-mesure », confie une source proche de la direction. Résultat : ESS Bourse n’est plus un challenger, mais une référence.
Derrière, BGFI Bourse s’installe à la deuxième place avec un portefeuille de 188,5 milliards FCFA (10,87 %), suivie par Société Générale Capital Securities, à 9,6 %. Ces deux sociétés, bien que puissantes, n’ont pas enregistré de bond spectaculaire. Leur croissance reste linéaire, soutenue par leurs maisons mères, mais sans l’élan entrepreneurial observé chez leur concurrent indépendant. Ensemble, le trio de tête concentre près de 45 % de l’ensemble des portefeuilles de la région, révélant une forte concentration du marché.
Le leadership d’ESS Bourse ne repose pas que sur les chiffres. Sur le terrain, la société a structuré des opérations majeures, notamment pour l’État gabonais avec une levée de 169 milliards FCFA aux côtés de CBC Bourse, et un second emprunt prévu en 2025 pour 85 milliards FCFA. Elle a aussi décroché l’introduction en bourse d’Aéroports du Cameroun. Ces opérations, souvent menées comme chef de file ou placeur, renforcent la confiance du marché.
Le rapport ne donne pas encore accès aux données du marché secondaire ni à la typologie des investisseurs, mais des signaux clairs émergent : les banques restent les principaux financeurs, et la mobilisation de l’épargne populaire reste faible. Une piste que les leaders devront explorer pour élargir la base des investisseurs et stimuler un marché qui aspire à plus de profondeur et de liquidité.