Pour stimuler l’industrie nationale et réduire la dépendance aux importations, le gouvernement congolais interdit temporairement l’entrée de certains produits d’hygiène dans l’ouest du pays. Une mesure protectionniste assumée, qui interroge toutefois sur la capacité de l’offre locale à répondre à la demande.
Le gouvernement de la République démocratique du Congo a pris une décision forte en matière de politique industrielle. Le 8 mai 2025, le ministre du Commerce extérieur, Julien Paluku Kahongya, a signé un arrêté suspendant temporairement l’importation de plusieurs produits d’hygiène dans la région Ouest du pays, notamment les couches jetables pour bébés, les lingettes, papiers hygiéniques, mouchoirs et serviettes. La mesure vise les provinces de Kinshasa, Kongo-Central et Kwilu.
L’objectif affiché est clair : protéger les unités industrielles locales qui produisent déjà ces articles. Le ministère invoque la nécessité de renforcer la compétitivité des entreprises nationales, dans un secteur souvent dominé par les importations. En ligne de mire, la substitution progressive aux produits étrangers, alors que la RDC cherche à industrialiser son tissu économique et à créer de l’emploi local.
À Kinshasa, plusieurs sociétés se sont positionnées sur cette niche. Parmi elles, Unity Manufacturing, Bopeto SARL ou encore Lani Services, qui produisent et conditionnent divers articles d’hygiène. Ces acteurs alimentent déjà les marchés urbains et institutionnels (hôtels, hôpitaux, administrations), mais leurs capacités réelles restent difficiles à quantifier, faute de données publiques consolidées.
Lani Services, notamment, se spécialise dans les mouchoirs, papiers de toilette et serviettes hygiéniques, et revendique un ancrage 100 % congolais. Bopeto SARL développe une offre complète de papier sanitaire sous sa propre marque, destinée à la consommation domestique et professionnelle. Si leur présence est bien réelle, leur aptitude à couvrir une hausse soudaine de la demande reste sujette à débat.
Conscient de ces limites, le ministère a prévu un mécanisme de dérogation. Les importateurs pourront, à titre exceptionnel, solliciter une autorisation temporaire d’importation, sous réserve de prouver que les besoins du marché ne peuvent être satisfaits localement. Ces demandes devront passer par le Guichet unique du commerce extérieur (SEGUCE-RDC), une plateforme visant à fluidifier les formalités.
Cette mesure protectionniste, bien qu’encore temporaire, s’inscrit dans une tendance plus large observée sur le continent, où plusieurs pays revoient leur dépendance aux importations de biens manufacturés de première nécessité. Reste à voir si cette stratégie portera ses fruits sans provoquer de tensions sur les prix à la consommation ni pénuries à court terme.