Face au sous-financement chronique de la collecte des ordures, le gouvernement camerounais envisage une contribution financière obligatoire des ménages. Inspirée du principe du « pollueur-payeur », cette mesure pourrait être intégrée aux factures d’eau ou d’électricité.
Confronté à un déficit structurel dans le financement de la collecte et du traitement des déchets urbains, le Cameroun envisage un tournant décisif : faire contribuer financièrement chaque ménage à la gestion des ordures. Cette proposition a été défendue par Célestine Ketcha Courtès, ministre de l’Habitat et du Développement urbain, lors d’une table ronde organisée récemment, en marge des états généraux sur la gestion des ressources en déchets.
Pour la ministre, l’actuel modèle basé principalement sur les subventions étatiques et les droits d’accises a montré ses limites. Avec un budget annuel de moins de 30 milliards FCFA pour plus de 360 communes, les ressources disponibles sont largement insuffisantes pour couvrir les besoins croissants. « Nous sommes tous d’accord que nous sommes des pollueurs. Il faut qu’on trouve une formule, peut-être par les factures d’eau, d’électricité… Il faut rapidement qu’on ait des solutions et des sources pérennes », a-t-elle affirmé. L’objectif est clair : diversifier les sources de financement et responsabiliser les citoyens.
Ce projet s’inspire de pratiques locales déjà existantes. À Dschang et Yaoundé 5ᵉ, les maires Jacquis Kemleu et Augustin Balla ont instauré une redevance de 2 000 FCFA par ménage et par trimestre. Selon eux, cette contribution, acceptée par les populations, « fonctionne à merveille », renforçant la conviction de la ministre.
Pour Célestine Ketcha Courtès, cette démarche relève du bon sens : « Pourquoi les ménages paient-ils l’électricité, l’eau, Internet… et ne devraient-ils pas payer pour un service des ordures dont ils sont les producteurs ? ». Toutefois, l’idée de faire supporter un nouveau coût aux ménages survient dans un contexte économique déjà difficile. Le pays est confronté à une inflation persistante, des perturbations récurrentes dans l’accès à l’eau et à l’électricité, et une fracture numérique qui limite l’accès stable à Internet, malgré les factures régulières payées par les usagers.
Au-delà de la collecte, le mode de financement public reste critiqué pour son opacité. Selon Philippe Camille Akoa, directeur général du Feicom, le problème ne réside pas uniquement dans le montant des ressources disponibles, mais dans leur libération effective par le Trésor public. Une fois les fonds logés dans le Compte unique du Trésor (CUT), leur affectation devient soumise à un arbitrage budgétaire global. Résultat : les virements pourtant enregistrés par les collectivités peuvent ne pas être immédiatement disponibles.