Mauvaise nouvelle pour le Gabon. Le 24 janvier 2025, l’agence de notation Fitch Ratings a annoncé la dégradation de la note de crédit du pays dirigé par le général Oligui Nguema, la faisant passer de CCC+ à CCC. Cette décision, prise dans un contexte économique difficile, reflète les tensions financières croissantes que connaît le pays de la CEMAC. En effet, cette dégradation survient après une précédente révision en juillet 2024, où la note avait déjà chuté de B- à CCC+, ce qui témoigne d’une détérioration progressive de la situation financière du pays.
Selon Fitch, cette révision négative a été motivée par « une pression accrue sur les liquidités », en raison de l’accès limité du Gabon aux marchés financiers régionaux. Le rapport précise que « l’appétit pour la dette publique sur le marché régional de la dette de la CEMAC s’est considérablement affaibli, en particulier au 2e semestre 2024 ». Malgré un emprunt important levé en juillet 2024 par les banques gabonaises, cette souscription syndiquée n’a pas suffi à endiguer la crise de liquidités qui secoue le pays.
La situation financière du Gabon est également exacerbée par des arriérés de paiement croissants, un facteur clé dans la dégradation de la note. Entre janvier et novembre 2024, les arriérés dus aux créanciers publics ont augmenté de 0,9 % du PIB. Ces retards concernent principalement les créanciers bilatéraux, ainsi que dans une moindre mesure les institutions multilatérales comme la Banque mondiale. Les arriérés envers les fournisseurs du pays suivent également cette tendance inquiétante, créant une spirale de problèmes financiers.
Depuis la prise de pouvoir des militaires en août 2023, le gouvernement gabonais a adopté une politique budgétaire expansionniste, mettant l’accent sur des recrutements massifs dans la fonction publique. Cette politique, bien qu’elle réponde à une pression sociale, a contribué à une détérioration des finances publiques. Fitch prévoit que la masse salariale pourrait augmenter de 7 % par an en 2024 et 2025, ce qui pèsera davantage sur un budget déjà très tendu. Cette stratégie pourrait aussi entraîner une augmentation des dépenses d’investissement, dans un contexte de déficits budgétaires croissants.
En 2024, le Gabon pourrait enregistrer un déficit budgétaire de 0,2 % du PIB, alors qu’il avait affiché un excédent de 2,5 % en 2023. Cette inversion de la tendance traduit la pression croissante sur les finances publiques, exacerbée par les choix politiques du gouvernement et les besoins sociaux. Une telle situation rend la gestion économique du pays encore plus délicate et les perspectives de redressement à court terme incertaines.
Face à cette situation, Fitch prévoit que le Gabon pourrait demander un programme d’assistance au Fonds monétaire international (FMI) à partir de 2025, après les élections présidentielles prévues le 12 avril 2025. Selon l’agence de notation, « un accord avec le FMI, comprenant un décaissement initial, sera probablement mis en place en 2025, fournissant un financement externe ». Cependant, Fitch souligne que les risques pour ce scénario sont élevés, car un tel programme exigerait des « changements de politique drastiques et impopulaires », dans un climat politique toujours volatile suite à la transition de régime de 2023.
De l’avis de certains experts, pour que le Gabon puisse sortir de cette impasse financière, des réformes profondes et impopulaires seront nécessaires. Notamment en matière de politique fiscale, de gestion des dépenses publiques et de renégociation des dettes. L’enjeu pour le gouvernement sera de convaincre les créanciers et les institutions internationales de sa capacité à mener ces réformes dans un environnement politique instable. Sans cela, la dégradation continue de la situation pourrait compromettre davantage l’avenir économique du pays.